Boogie
de Radu Muntean
Quinzaine des réalisateurs
palme

Sortie en salle : 17 juin 2009




Le cinéma roumain se porte bien, merci. Un prix Un Certain Regard en 2005 avec La mort de Dante Lazarescu, de Cristi Puiu, la Caméra d’Or pour Corneliu Porumboiu avec A fost sau n-a fost (12h08 à l’est de Bucarest), La Palme d’Or doublée du Prix Éducation nationale l’an dernier avec Quatre mois, trois semaines, deux jours de Christian Mingiu… C’est à la Quinzaine des Réalisateurs que Radu Muntean a présenté cette année son troisième long métrage après une abondante production de spots publicitaires.
Bogdan, la trentaine bien portée, assume son rôle de jeune père de famille en feignant l’épanouissement, jouant avec son charmant fils sur la plage, pendant que sa femme, enceinte d’un deuxième petit, se repose, le regard attendri sur cet harmonieux tableau. Cette jeune mère est plutôt jolie d’ailleurs, un brin rigide, mais semblant partager le bonheur d’une nouvelle vie, certes conventionnelle, mais épanouie et pleine de promesses. Quand Bogdan rencontre par hasard un ancien copain de faculté, compère de beuveries estudiantines, puis un deuxième, l’équilibre devient instable, Bogdan penchant vers le Boogie d’avant (surnom porté quand il n’avait ni femme ni enfant), avec un brin de nostalgie mâtiné d’une envie irrésistible de se décharger pour un temps des responsabilités qui sont aujourd’hui les siennes.


Querelles classiques avec sa femme, clash inévitable et échappée (belle ?) avec ses deux potes pas plus fiers au fond de leur liberté dont ils font peu de choses (l’un est devenu gras du bide, l’autre picole d’ennui entre deux boulots instables). Mais ils sont contents de se retrouver, avec cette amère illusion de pouvoir (re)vivre l’intensité d’un passé magnifié. Filmé en longs plans séquences très mobiles, avec une caméra toujours à bonne distance – on se prend à penser à Cassavettes – Boogie suit les trois copains, mettant en contre-jour leurs doutes, souvent leur gentille bêtise, parfois les grosses désillusions et douloureuses frustrations tout au long de cette nuit qui n’aura servi pour Bogdan qu’à reprendre un peu d’élan pour sa vie d’adulte. Le réalisme affiché de tous les plans, allant jusqu’au défaut de la longueur, sinon de certaines séquences, en tous cas du film dans sa globalité, atteint parfois le meilleur, comme dans cette scène « matrice » où les garçons ramènent une fille rencontrée dans un bar à putes. Ramona (ça ne s’invente pas ? Si !) sera moins l’objet de l’abandon physique de celui du trio qui exécute sa passe, que le prétexte aux discussions existentialistes des deux autres, grelottant sur le balcon, une cigarette entre les doigts. Au final, malgré ce défaut de rythme, Boogie laisse une marque forte et originale d’un cinéma roumain décidément en pleine forme.

Jean Gouny


1h43 - Roumanie - Scénario : Alexandru Baciu, Razvan Radulescu, Radu Muntean - Photo : Tudor Lucaciu - Décors : Sorin Dima - Musique : Electric Brother - Montage : Alexandru Radu - Son : Drago Stanomir - Interprétation : Drago? Bucur, Anamaria Marinca, Mimi Br?nescu, Adrian Vancic?, Vlad Muntean.

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