Sueurs froides |
Variations troubles sur un homme tourmenté.
Étrange destinée que celle de Vertigo. Mal aimé à l'époque de sa sortie, trop morbide et probablement trop audacieux, il est devenu avec le temps un des Hitchcock les plus appréciés, et a même été récemment désigné meilleur film de tous les temps, dépassant Citizen Kane d'Orson Welles. Derrière son terne titre français, Sueurs Froides, se cache ainsi l'un des films les plus influents des dernières décennies. La complexité et la richesse de son scénario ont en effet inspiré un bon nombre de cinéastes (De Palma en tête, bien sûr), pour tisser des variations plus ou moins subtiles sur le thème du double, du fantôme de la femme aimée, de l'obsession et des faux-semblants. |
Au-delà de la trame brillante et de moult éléments techniques qui élèvent le film au statut d'œuvre majeure, il ne faudrait pas oublier qu'il s'agit bien là d'un film de Hitchcock, au sommet de sa carrière américaine. Réalisé en 1958, Vertigo succède à quelques
œuvres aussi audacieuses formellement, comme Le Crime était presque parfait (1954) ou L'Homme qui en savait trop (version de 1956), deux films en Technicolor où le cinéaste expérimentait déjà quelques effets (comme la 3D dans Le Crime était presque parfait). Vertigo est ainsi un aboutissement tant thématique - le film cumule et entrelace toutes les névroses et tous les fétiches du cinéaste - que formel. Comment oublier ces plans sidérants, les fameux travellings optiques, qui rendent visibles le vertige et le malaise de James Stewart ? Et surtout, le souverain 70mm en VistaVision qui confère au film un grain et une chaleur si particulières dans la photo : lors de la filature magistrale de la première partie, la découverte de Kim Novak chez un fleuriste est un feu d'artifice de teintes et de textures ; les cadrages aventureux et le montage sophistiqué lors de la scène au musée (dont De Palma se souviendra pour Pulsions) sont rehaussés par des rouges profonds (celui des bijoux, des étoffes, des fleurs) ; mais plus tard dans le film ce sont des teintes froides, glauques au sens grec du terme, comme le vert et le bleu, qui s'insinueront par volutes dans l'atmosphère délétère du long métrage. Une présentation de Park Circus. Restauration numérique 4K à partir du négatif VistaVision faite par Universal Studios Maxime Antoine
|
1958 - 2h09 - États-Unis - Scénario : Samuel A. TAYLOR, Alec COPPEL, d'après le roman ''Entre les morts'' de Pierre Boileau et Thomas Narcejac - Interprétation : James STEWART, Kim NOWAK, Barbara BEL GEDDES, Tom HELMORE, Henry JONES, Raymond BAILEY. |