Missing (Porté disparu) |
Les affaires étrangères Charles (John Shea), un journaliste américain, et son épouse Beth (Sissy Spacek), se sont installés à Santiago du Chili. Mais suite au coup d'État qui éclate le 11 septembre 1973, Charles disparaît brusquement. Son père Ed (Jack Lemmon), un important homme d'affaires new-yorkais, vient en aide à Beth pour tenter de le retrouver... Basé sur un roman éponyme relatant les faits réels dont il est question, Costa-Gavras reprend la démarche qui a avait été la sienne dans Z : réaliser un thriller sous forme d'enquête criminelle afin de sensibiliser le grand public à un scandale politique. Après la dictature des militaires grecs, celle du général Pinochet, dont le coup d'État a été appuyé par les États-Unis, est ici sur le banc des accusés. Le Chili est cité de façon explicite (contrairement à la Grèce dans Z) et le spectateur assiste, médusé, à un dossier mettant directement en cause l'implication des États-Unis dans un crime politique et, partant, son soutien à un régime totalitaire. Pour rendre efficace son pamphlet, le cinéaste comme à son habitude a eu recours à des stars et mêle des éléments mélodramatiques à un récit haletant, permettant une adhésion parfaite de son public. La construction de Missing est pourtant plus complexe et subtile qu'on ne le penserait, avec ses flash-back en trompe-l'œil et des séquences kafkaïennes : |
la machine bureaucratique et militaire amène Beth et son beau-père à côtoyer une faune intrigante, jusqu'à la banalisation de l'horreur, qui culmine avec cette séquence de cadavres entassés dans un couloir administratif. Pour son premier film américain, Costa-Gavras s'est aussi glissé dans le moule d'un certain cinéma militant de studio, prolifique dans les années 70, et qui avait donné des réussites de la trempe d'À cause d'un assassinat d'Alan J. Pakula. Autant dire que l'alibi politique du film de Costa-Gavras et son désir de cibler un vaste public international ne l'empêchent pas de garder une ambition artistique. Si le cinéaste a parfois raté son coup (Hanna K, sur le conflit israélo-palestinien, ou Music Box, sur les anciens nazis), Missing est sans doute son film le plus abouti, avec L'Aveu et Amen. L’œuvre obtint la Palme d'or au Festival de Cannes 1982 (ex-æquo avec Yol de Yilmaz Güney), ainsi que le prix d'interprétation masculine pour Jack Lemmon, impérial, et qui confirmait, après Le Syndrome chinois, qu'il était aussi à l'aise dans le drame que la comédie. Gérard Crespo
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1982 - 1h59 - États-Unis - Scénario : COSTA-GAVRAS, Donald STEWART, d'après le roman de Thomas Hauser - Interprétation : Jack LEMMON, Sissy SPACEK, John SHEA, Melanie MAYRON, Janice RULE, Charles CIOFFI, David CLENNON, Jerry HARDIN, Richard BRADFORD. |