Guy |
Quand j’étais chanteur Gauthier, un jeune journaliste, apprend par sa mère qu'il serait le fils illégitime de Guy Jamet, un artiste de variété française ayant eu son heure de gloire entre les années 60 et 90. Celui-ci est justement en train de sortir un album de reprises et de faire une tournée. Gauthier décide de le suivre, caméra au poing, dans sa vie quotidienne et ses concerts de province, pour en faire un portrait documentaire… Ce second long métrage d’Alex Lutz qui tient également le rôle de Guy surprend par l’originalité de son dispositif et la finesse de son scénario. Après le « documenteur », voici le genre du faux documentaire, même si la proposition n’est pas complètement novatrice (d’autres films avaient exploré cette voie dont Zelig de Woody Allen). Toujours est-il que Guy Jamet n’existe pas et est né de l’imagination du cinéaste, bien que des souvenirs personnels aient inspiré le récit : le père de l’acteur Tom Dingler (interprète de Gauthier et ami d’enfance du réalisateur) n’est autre que Cookie Dingler, chanteur du tube Femme libérée dans les années 80, dont le parcours a marqué Lutz. Quand on entend les chansons de Guy Jamet, au carrefour de la vague yé-yé et des ritournelles de crooner, on songe plutôt à un sous-Claude François (jalousé par le chanteur dans le film), ou à un mélange de Michel Delpech et d’Hervé Vilard, le personnage étant par ailleurs dans le privé aussi délicat qu’un invité des Grosses têtes. |
Car l’un des mérites de Guy est d’assumer son ton de caricature, sans grossir le trait ni caresser le public dans le sens du poil. Le film évite en fait deux écueils. En premier lieu, il ne témoigne d’aucun mépris pour ses personnages, d’ailleurs plus nuancés qu’ils n’en ont l’air (on est surpris d’apprendre les véritables goûts du chanteur à la fin de l’histoire). Ensuite, Alex Lutz ne montre pas de fascination envers le kitsch et la ringardise de certains artistes de variétés ou de spectacles datés, ce que d’autres cinéastes n’ont pas toujours évité, à l’instar de François Ozon dans Potiche ou Florent Emilio-Siri dans Cloclo. Guy est en outre un très beau récit sur les relations père-fils, sans forcer sur la charge émotionnelle, les plans fixes sur un homme insatisfait aux niveaux artistique et familial ainsi que des dialogues par moments suggestifs suffisant à interpeller le spectateur. Enfin, Guy repose beaucoup sur le jeu de comédien d’Alex Lutz, grimé et vieilli, expressif sans être cabotin, et qui n’est pas sans rappeler Guillaume Gallienne dans Les Garçons et Guillaume, à table ! Les actrices qui lui donnent la réplique sont tout aussi remarquables, avec une mention pour Dani en ex-gloire des seventies et Nicole Calfan, divine en attachée de presse protectrice et bienveillante.
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1h41 - France - Scénario : Alex LUTZ, Anaïs DEBAN, Thibault SEGOUIN - Interprétation : Alex LUTZ, Tom DINGLER, Pascale ARBILLOT, Nicole CALFAN, DANI, Elodie BOUCHEZ, Marina HANDS, Brigitte ROÜAN, Julie ARNOLD. |