« Tu tournes en rond. »

Premier long métrage du monteur Andrew Hulme, qui avait collaboré avec Anton Corbijn (Control), Snow in Paradise a une forte dimension autobiographique. En effet, le coscénariste Martin Askew, qui joue également dans le film, a inspiré le personnage principal de Dave (Frederick Schmidt). Ce dernier est un jeune délinquant toxicomane qui opère dans le quartier de l'East End de Londres. De trafics de stupéfiants en escroqueries diverses, il voudrait tourner la page mais peine à décrocher. Les malheurs arrivés à Tarik, son meilleur pote, puis la rencontre avec Amjad, un imam bienveillant, vont modifier le cours de son existence... Le film séduit pas son atmosphère mélancolique et son refus du sensationnel, malgré un sujet qui s'y prêtait. Empruntant à la fois au cinéma social anglais d'un Ken Loach et au polar indépendant (on songe au récent Quand vient la nuit de Michaël R. Roskam), Snow in Paradise semble avoir aussi pour modèle le Scorsese de Taxi Driver, de par cette thématique de la rédemption religieuse dans un monde pourri.

Les mauvais trips de Dave, qui agissent sur sa conscience, donnent lieu à des scènes qui alternent présent et passé, imaginaire et réel, avec un sens certain du découpage. Si le style d'Andrew Hulme évoque quant à lui la démarche d'un Steve McQueen (Shame), il n'en a cependant pas l'éclat. Snow in Paradise tient un peu trop de l'exercice scolaire et peine à imposer une vision originale de cinéma. Et les auteurs ont du mal à transcender les archétypes, notamment dans la typologie des personnages, du mafieux à qui on ne la fait pas à l'amie au grand cœur. Les interprètes sont par contre brillants, à commencer par Frederick Schmidt, une véritable révélation, qui crève littéralement l'écran. On l'avait déjà repéré, tout comme Ashley Chin qui joue Amjad, dans le film de prison Les Poings contre les murs de David Mackenzie. À leurs côtés, Aymen Hamdouchi (Touristes) s'avère un autre espoir du cinéma anglais. Au final, ce coup d'essai dégage un charme réel mais on attend le second long métrage de Hulme pour voir s'il a l'étoffe d'une véritable personnalité du 7e art.

Gérard Crespo