Brooklyn |
Le Freestyle au féminin Coralie, jeune rappeuse suisse de vingt-deux ans se produisant sous le nom de Brooklyn, quitte son pays et un père qui ne la comprend plus, pour s’installer à Paris. Logée chez Odette, une retraitée, elle trouve un petit job dans une association musicale de Saint-Denis, en banlieue parisienne. Lors d’une soirée slam, elle est poussée sur scène par l’un des animateurs. D’abord hésitante, elle conquiert son public et tape dans l’œil d’Issa, jeune rappeur, l’étoile montante de la ville… Premier long métrage de fiction de Pascal Tessaud, jusque-là scénariste, chef-opérateur, auteur de courts métrages et de documentaires (Slam, ce qui nous brûle, 2007), Brooklyn est ce qu'il est convenu d'appeler un « petit film », modeste par son budget et son scénario, ce qui n'exclut pars l'ambition et le talent. Pascal Tessaud a voulu « faire du cinéma avec les gens de Saint-Denis », aidé par un mode de financement alternatif et une équipe sollicitant les énergies locales. Le film se situe en apparence dans le cadre balisé d'un certain cinéma de banlieue. Depuis Le Thé au harem d'Archimède de Mehdi Charef au récent La Vie en grand de Mathieu Vadepied, le cinéma français a souvent décrit le désarroi d'une jeunesse désœuvrée ayant du mal à trouver sa voie dans une société individualiste et inégalitaire, et qui cherche une échappatoire en s'initiant aux trafics en tous genres ou en recherchant l'expression artistique. |
Brooklyn n'échappe pas à la règle, et les pièces incontournables d'un dispositif naturaliste sont bien présentes, encore que Coralie ne s'en sort pas si mal dès son arrivée en France puisqu'elle trouve un logement et un emploi avec la même facilité que l'immigré réfugié dans Dheepan de Jacques Audiard. Mais Pascal Tessaud préfère adopter une autre démarche, plus proche d'une certaine mouvance indépendante américaine couvrant un éventail d'œuvres aussi diverses que Slam de Marc Levin ou Whiplash de Damien Chazelle, sans égaler leurs qualités. Brooklyn peut alors être perçu comme un joli récit d'initiation à une passion musicale, et la beauté des séquences s'y rapportant ne sont pas pour rien dans le charme exercé par le film. Comme l'a écrit Jean-Louis Gonnet, « le récit va à l’essentiel, se met au service de ses protagonistes, s’appuyant en toute confiance sur leur énergie et leur personnalité ». Les interprètes, débutants ou non professionnels, sont d'ailleurs en harmonie avec un récit très proche de leur parcours personnel ; c'est particulièrement le cas pour KT Gorique, championne du monde de freestyle End of the Weak, d'un naturel et d'une sensibilité qui en font une vraie révélation. Ils sont bien épaulés par quelques acteurs chevronnés dont la grande Liliane Rovère, second rôle discret mais touchant. Gérard Crespo
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1h23 - France - Scénario : Pascal TESSAUD - Interprétation : K.T. GORIQUE, Rafal UCHAWA, Jacil NACIRI, Liliane ROVERE, Véronique RUGGIA. |