Le gamin au vélo
The Kid with a bike
de Luc et Jean-Pierre Dardenne
Sélection officielle
En compétition
Grand Prix



Sortie en salle : 18 mai 2011




« Ne cherche plus à me voir »

Si Le Gamin au vélo nous replonge dans l’univers des frères Dardenne, ils ne font ni du sur place, ni de la roue libre : l’enfance, l’urgence, la détresse et la banlieue de Liège, leur ville, l’âme, la terre, le peuple de Wallonie, dont Brel disait : « Je trouve que Liège est la ville la plus folle de Belgique, c’est-à-dire où l'on rencontre le plus peut-être de ces espèces de folies un petit peu aériennes qui provoquent, bien sûr peut-être des anarchistes, mais aussi des poètes. »

Entre les deux, et au-delà du portrait sans concession d’un mineur délinquant, qu’est Cyril ? Gamin sans toit ni loi en été, enfant nu façon Pialat, indomptable, tenace, agressif, violent, courageux, endurci par la souffrance, petit dur surnommé Pitbull qui force le respect, il n’a peur de rien sauf d’être repoussé par son père, largement moins mature que lui, dépassé, démissionnaire : « Je ne peux pas te reprendre. » Le rejet par ce père qu’il aime sans parvenir à le comprendre lui laisse, comme seule compagne de tous les instants, la colère. Alors Cyril s’accroche à son vélo – attribut indissociable du plat pays, de ses épreuves cyclistes et de ses champions – prolongement indispensable des angoisses du gamin.

Les réalisateurs ont l’intelligence de ne rien démontrer quant aux motivations de Samantha, coiffeuse volontaire pour accueillir Cyril les week-ends, sorte de fée sortie de nulle part qui va pousser inconsciemment Cyril à ranger les armes : on n’explique pas les miracles. Ces deux-là vont réinventer ensemble des sentiments, se dompter mutuellement, rendre leurs vies privées respectives disponibles à l’envahissement de l’autre.

Énergie, sècheresse d’un style qui n’autorise ni larmes ni complaisance... La caméra des Dardenne reste obstinément dans la roue du vélo de Cyril, comme lui-même s’attache à son obsession. Quinze ans après La Promesse, c’est Thomas Doret (formidable sale gosse) qui, en selle, occupe la place de Jérémie Rénier, lequel endosse aujourd’hui la poignante dégaine de Guy, père paumé de Cyril, autiste face à la supplique de son fils. Le choix de Cécile de France, Rolls des actrices outre-quiévraines, rajoute aux atouts cumulés qui font du Gamin au vélo un grand film de cinéma, récompensé d’un Grand prix amplement mérité.

Marie-Jo Astic



1h27 - Belgique - Scénario : Luc et Jean-Pierre DARDENNE - Interprétation : Cécile de FRANCE, Thomas DORET, Jérémie RENIER, Fabrizio RONGIONE.

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