« Mary a tout pris »

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’efficacité du « cinéma d’acteurs » de Mike Leigh se révèle dès les premiers plans de ses films. De Meantime, en 1984 à Vera Drake plus proche de nous, en passant par Life is sweet ou Secrets et Mensonges, les personnages existent d’emblée, de chair et de sang, même quand, comme ici, ce ne sont pas les personnages principaux. On serait presque ainsi frustrés de ne plus avoir de nouvelles de cette femme révélant à reculons sa détresse à Gerry, conseillère psychologique dans un centre social de la périphérie de Londres.

Gerry (Ruth Sheen toute en force tranquille) et son géologue de mari Tom (ça ne s’invente pas), ont construit une vie peut-être un peu plan-plan, certes, mais ponctuée justement par les plants de leur jardin dont les travaux horticoles de saisons ponctuent cette autre année de leur existence tranquille, mais pas si sweet que ça. Car comme pour tout déséquilibre qui se respecte, il y a le troisième sommet du triangle, l’amie de la famille, collègue aussi, flirtant avec la cinquantaine mais aussi avec le jeune fils de la famille. Insupportable mais attachante, Mary (formidable Lesley Manville qui méritait bien un prix d’interprétation féminine – sauf le respect à Juliette Binoche) a un ego aussi hypertrophié que son besoin d’amour, et une maladresse qui le dispute à son manque de lucidité psychologique !