Ils aimeront tous, sauf nous…
Trois adolescentes, trois amies pour une seule soirée dansante. Katia, Vika et Janna, qui traînaient jusqu’ici leurs quatorze ans dans une banlieue morne de Moscou, attendent avec fébrilité la fête du samedi soir. Et pourtant, pleines de rêves, fortes de promesses, si elles savaient...
Un scénario déjà vu, rabâché par les pires sitcoms américaines : on espérait de Valeria Gaï Guermanika un brin d’originalité et de folie pour nous surprendre. Peine perdue. La réalisatrice évite très rarement le cliché y compris dans les scènes crues, violentes ou d’émotions ; seule la fin, d’une noirceur accablante, nous étonne par sa vision désenchantée de la jeunesse.
L’évolution des adolescentes est certes palpable, mais leurs parcours en roue libre sont déjà tout tracés, et leur transformation finale prévisible. Trois stéréotypes donc, mais trois actrices prometteuses : dans des rôles choisis par leurs soins, elles sont convaincantes, les seules capables de susciter un intérêt partiel pour ce film chez le spectateur.
Suivis par une caméra toujours en mouvement, ces personnages ne sont jamais mis en valeur mais semblent traqués jusque dans leur intimité. Images tremblotantes, cadrage maladroit et gros plans inexplicables, la réalisatrice a voulu donner une certaine vie à son œuvre, mais ne nous donne que le vertige. Unique moment de grâce visuelle de ce film : la séquence de la piste de danse, dans laquelle la caméra semble flotter, aérienne, entre les lycéens, capturant au passage les quelques instants de symbiose entre les êtres.
Ce film est à l’image de sa réalisatrice : étrange, haut en couleurs et dérangeant. « Tant qu’on n’est pas adultes » se répètent les jeunes filles… Le cinéma de Valeria Gaï Guermanika devrait peut-être enfin le devenir…
Violaine Gioffredo, Mélanie Thoinet
Lycée Carnot de Cannes
Caprice d’une fifille
Rien sans rien.
Décidément, l’adolescence semble passionner les grands réalisateurs de notre époque… tous comme les petits. Alcool, cigarettes, trahison, mutilation, sexe, drogue, « craquage » de cours. Les réalisateurs contemporains sous-entendent que ces quelques mots résument notre jeunesse. Ces clichés redondants construisent le film de Valeria Gaï Guermanika.
Mais … pourquoi une si mauvaise image de l’adolescence ? Pourquoi utiliser trois figures féminines pour la représenter ? Quel est le message ?
Cette histoire est la sienne. En manque d’aventures palpitantes ( ?), elle met en scène une étape commune de la vie. Futée, elle a voulu donner du piquant à son histoire, au lieu de cela, elle caricature le passage de l’enfance à l’âge adulte. On se demande, en tant qu’adolescentes, ce que sont devenus l’amour, l’amitié et l’émotion. Quelle idée de donner une image si rude !
L’utilisation des trois fillettes nourrit un portrait candide voire sexiste. Non, une jeune fille n’est pas seulement béate ! Si, comme elle le dit, c’est une partie d’elle-même, Valéria Gaï Guermanika garde une piètre opinion de ses années passées.
Où en étions-nous ? Ah oui… Le message… ! Il nous a peut-être échappé mais nous l’avons trouvé discret. Dépourvu de tout sens, le scénario est peu crédible : défier l’autorité ne signifie pas forcément fuguer, répondre absente en cours ou provoquer jusqu’à s’en faire frapper.
Il y a tout de même le jeu des actrices aux sourires mutins qui rappelle le vieil adage : quinze ans, le bel âge.
A l’image des adolescentes de Ils mourront tous sauf moi, la réalisatrice de 23 ans nous semble encore en crise, et le film n’en est qu’un caprice.
Mais que pensera-t-elle de l’âge adulte ?!
Camille Rolland, Margaux Janin
Lycée Saint Exupéry de Lyon
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Boire et déboires
Trois jeunes filles, une histoire commune. Dans la banlieue de Moscou, Vika, Janna et Katya, lycéennes unies comme les doigts de la main, s’apprêtent à faire leurs premiers pas dans l’univers séduisant mais inconnu des plaisirs adolescents. La réalité est pourtant bien différente de l’idée qu’elles s’en font…
Dans son premier long métrage, Valeria Gaï Guermanika dépeint avec brio un tableau réaliste dans la beauté et la cruauté du monde décalé de l’adolescence. Entre histoires d’amour immatures et serments d’amitié éternelle, elle a tout de même su relever le défi de ne jamais tomber dans le cliché, bien que la limite ait souvent été frôlée. Totalement immergé dans les aventures de ces lycéennes grâce à l’utilisation de la caméra à l’épaule, le spectateur est tellement proche des personnages que l’émotion en est presque palpable. Les plans longs et les prises de vue rapprochées rythment le film et renforcent l’impression de vivre l’histoire.
Tous les ingrédients sont réunis pour un cocktail explosif de vérité et de sincérité : on passe rapidement du rire aux larmes, d’une violence brutale à une complicité infaillible entre les personnages. Le spectateur, entrainé dans un ascenseur émotionnel, est d’autant plus affecté par le destin des héroïnes qu’il s’y identifie totalement. Caractères forts et pluriels, personnalités exacerbées et très humaines, on se retrouve partiellement dans chaque personnage. Personnages d’ailleurs parfaitement assumés et interprétés par leurs actrices, déjà très professionnelles tout en restant naturelles.
Film choc. Poignant. Un feu d’artifice mais jamais artificiel, des émotions à l’état pur… Ils mourront tous sauf moi, premier long métrage de Valeria Gaï Guermanika, est le prélude à un parcours qui s’annonce prometteur. Mortel…!
Arnaud Schmitt, Nadège Robin
Lycée Jules Verne de
Nantes
Pu(e)berté !…
Les pas d’un proviseur austère à la rigueur repoussante résonnent dans le couloir de ce lycée banlieusard. Ce seul moment d’austérité annonce le rythme saccadé qui donnera au film sa seule originalité.
Trois poupées russes qui bouleversent et écoeurent, poussées dans la spirale initiatique d’une adolescence précoce, affrontent de plein fouet, le sexe, la drogue et l’alcool. Un style épuré qui écorche les cœurs, dresse le portrait de ces trois minettes. L’une se cache derrière ses boucles d’or, l’autre cherche l’extrême en maniant le rasoir et la dernière mue par des envies d’escapade, joue avec les nerfs de ses parents. Ces portraits d’une conventionalité repoussante accentuent le thème de l’oxymore familiale. Insultes, violence, insolence sont mêlées pour faire de ces diablesses de vraies petites rebelles.
La superficialité de ce film est reprise par son style brut, et creux. Pas de superpositions d’images, juste de longs plans-séquences qui suivent les ébats écervelés de cette jeunesse décadente. Se retrouver dans les dédales du lycée et choisir son chemin dans le carrefour des violences sexuelles et verbales semblent les seuls enjeux auxquels le spectateur peut encore se rattacher. Aucune sensualité, pas d’identification possible malgré l’universalité des thèmes proposés, juste un réalisme puant et privé d’une once de poésie. De ces dialogues au tac au tac repris comme des leitmotive, où promesses d’une amitié éternelle ripostent aux insultes exacerbées, on ne retiendra que la musicalité exotique de la langue russe.
Projeté dans cet univers hostile, ce film est l’expression d’un mal-être oppressant. Transpiration, dégoût et répulsion le colorent d’une teinte jaunâtre où la jeunesse, encore une fois, semble incarner le pessimisme d’un avenir en déclin.
Pauline Proffit
Lycée d’Artagnan de Nogaro
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