Gozu Takashi Miike Quinzaine des Réalisateurs |
Une bonne surprise, qui choqua maints festivaliers cannois, les repères narratifs et esthétiques n'étant pas balisés. C'est aussi le meilleur film de Takashi Miike, auteur de la série des Dead or Alive, très prisée en DVD. Commencé dans le genre du film de yakuza, il dévie rapidement vers le road movie policier, lorsque Minami, personnage central, est mandaté pour conduire un chef de gang paranoïaque dans une ville lointaine où il devra l'abattre. Mais un mauvais freinage tuera l'encombrant caïd, menant l'œuvre vers une autre direction, à l'orée du fantastique et du symbolisme. On pourrait classer Gozu dans la catégorie des OFNI (objets filmiques non identifiés), quelque part entre Un soir, un train et Blue Velvet. Le récit se veut pourtant linéaire et n'est pas avare de tension dramatique : la rencontre de l'innocente jeune femme sauvée in extremis des griffes du yakuza ou l'arrivée dans la mystérieuse pension distillent un malaise certain tout en s'avérant efficaces sur le plan du scénario. |
Mais ce sont surtout les passages irréels qui imprègnent le plus le spectateur, tel ce lait maternel sécrété et vendu par une aubergiste sexagénaire, ou cet accouplement surréaliste et gore auprès duquel le final de L'Exorciste tient lieu de séquence de patronage. Il faut aussi souligner le travail du chef opérateur dont les couleurs riches et éclatantes contribuent au climat d'étrangeté sans verser dans la teinte criarde. Certains seront sans doute heurtés par la violence gratuite (le « chiahuahua anti-yakuza ») qui lève quelques tabous du genre, à l'instar de Funny Games. Mais suivant la démarche de Haneke, Takashi Miike refuse toute fascination et complaisance pour les actes montrés. |
2h09 - Japon - Scénario : Sakichi Sato - Image : Kazunari Tanaka - Son : Hitoshi Tsurumaki - Musique : Koji Endo - Montage : Yasushi Shimamura - Interprétation : Hideki Sone, Sho Aikawa, Kimika Yoshin. |