L'Homme sans passé
The Man Without a Past - Mies vailla menneisyyttä

Aki Kaurismäki
Sélection Officielle
Grand Prix
Prix d'interprétation féminine pour Kati Outinen
Prix du jury œcuménique
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L'Homme sans passé est le second volet d'une trilogie consacrée par Aki Kaurismäki à la Finlande, son pays natal. En 1996, Au loin s'en vont les nuages racontait l'histoire d'un couple de chômeurs qui remontait la pente en ouvrant avec succès un restaurant. Ici, c'est également de renaissance qu'il s'agit : le personnage principal est un inconnu qui après avoir été méchamment amoché par trois loubards se retrouve à l'hôpital. Il s'en échappe et un bandage impressionnant en font d'abord un « homme sans visage ».
Vagabond amnésique, il suscite la compassion d'une militante de l'Armée du salut qui l'aidera dans sa recherche de l'intégration sociale. Dès le premier quart d'heure, le style sans fards de Kaurismūki laisse présager le chef-d'œuvre : des séquences quasiment muettes contrastent avec la violence du passage à tabac et l'on peut estimer que l'auteur a retenu les leçons de Juha (1999), son mélodrame entièrement muet qui se voulait un hommage au cinéma des années 20. L'humour pince-sans-rire qui berce L'Homme sans passé offre un contrepoids à des situations qui pourraient a priori paraître grotesques : la chorale de l'Armée du salut transformée en orchestre de rock, les retrouvailles avec l'ex-femme et la jalousie maladive du nouveau compagnon de

celle-ci, ou l'entretien avec l'employée de l'agence pour l'emploi qui refuse de l'inscrire faute d'identité. Cet humour culmine avec la description d'un hold-up et dans la scène du commissariat où les échanges verbaux entre un policier et un avocat nous valent des dialogues déjà d'anthologie.
Mais Kaurismäki est surtout un maître de la peinture des marginaux et des exclus : clochards ivrognes, paumés mal-logés sont ici filmés avec beaucoup de chaleur et de tendresse humaine, dans une vision qui oscille entre désespoir et burlesque, et qui n'exclut pas le happy end. Notre homme sans passé s'avère donc être le digne descendant de Charlot et des héros de Frank Capra. Alternant passages muets et scènes de dialogues très travaillés, plans-séquences et amples mouvements de caméra, l'auteur concilie sobriété et lyrisme, dans une mise en scène au service d'une vision généreuse de l'humanité. Dans le principal rôle féminin, Kati Outinen, actrice fétiche du réalisateur, réalise une prestation étonnante, toute d'émotion contenue, et qui lui a valu un prix d'interprétation mérité.

Gérard Crespo


1h37 - Finlande - Scénario et dialogues : Aki Kaurismäki - Images : Timo Salminen - Montage : Timo Linnasalo - Interprètes : Markku Peltola (L'homme), Kati Outinen (Irma), Juhani Miemalä (Nieminen), Kaija Pakarienen (La femme de Nieminen), Sakari Kuosmanen (Anttila), Tähti (Hannibal, le chien).

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